Le monstre de Notre-Dame (Marc Chagall)

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La peinture de Marc Chagall cherche sans cesse à établir un pont entre la France, son pays d’adoption, et son identité propre. Après avoir quitté sa Russie natale pour s’installer à Paris en 1923, Chagall peint souvent la capitale, symbolisée à travers ses deux plus grands monuments : la Tour Eiffel et Notre-Dame. Ici, malgré les libertés prises avec les règles de la perspective, on reconnaît à l’arrière-plan de la cathédrale le profil des bâtiments qui longent la Seine Rive droite : le Théâtre de la Ville, la Tour Saint-Jacques, la place du Châtelet. Mais le paysage urbain n’est pas l’objet du tableau. Dans cette toile, intitulée Le Monstre de Notre-Dame, le peintre parvient à fusionner l’image traditionnelle de Paris avec son imaginaire propre, à travers une réinterprétation de la figure du Stryge. Ce personnage emblématique de Notre-Dame, et par extension de toute la capitale, rejoint ici le bestiaire dont Chagall aime à peupler ses toiles. Bien reconnaissable à sa pose, et quoique transformé en une créature hybride mi-femme mi-chèvre, il occupe le centre de la composition et contemple rêveusement la capitale colorée d’un bleu profond par le clair de lune. A ses côtés, un coq chante et appelle le matin qui approche, annoncé par un oiseau doré. Un couple amoureusement enlacé surplombe ce binôme animal. Entre aube et aurore, la toile peut être lue comme un hommage rendu à la ville que Chagall a quittée quelques années plus tôt pour s’installer dans le Midi, aussi bien que comme une métaphore du renouveau et de l’espoir qui animent la vie du peintre, un an après son mariage avec Valentina Brodsky, sa seconde femme.

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